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À propos

Crédit photo : Charlène Yves

Interview par Nessim Cohen (Instagram : neshimu_kohen)

Vous pouvez me dire un peu qui vous êtes, où vous vivez, d’où vous venez ?

Je m’appelle Guillaume Regler, je vis actuellement entre Paris et la région du Jura. 
En tant qu’artiste, j’ai créé un univers qui rassemble photos, dessins, ma maison de thé nomade (Guan Tcha) et une production d’objets en bois et céramiques notamment.
Tout ce que je fais d’artistique émerge du besoin d’exprimer quelque chose de personnel. C’est pour cela que je me revendique comme artiste plutôt qu’artisan.


Une maison de thé nomade ? 

J’aime vraiment partager le thé et j’ai envie de le faire découvrir aux gens. Je voulais faire quelque chose qui ne soit pas élitiste. Je n’avais pas envie de créer un endroit fixe, je voulais aller chez les gens pour proposer des dégustations. Je me déplace donc avec mon matériel, c’est ce que j’appelle une maison de thé nomade.


Comment en êtes-vous venu au travail du bois et comment l’avez-vous étudié ?

J’ai commencé à travailler le bois seulement en 2020, Je me considère encore en apprentissage. Au départ, j’ai une formation dans la joaillerie et les métiers d’arts. J’ai fait deux ans de formation en céramique puis j’ai fait de la bijouterie à Paris. J’ai travaillé quelques années en atelier puis en conception 3D. À partir de ce moment, je ne travaillais plus avec mes mains et cela me frustrait. J’ai donc arrêté la bijouterie pour me lancer dans la photo et la conception d’ustensiles pour le thé.


Comment travaillez-vous le bois ?

Le bois est généralement récupéré d’anciens objets. C’est du bois qu’on me donne ou que je trouve en forêt. Je travaille plutôt avec des bois durs comme le chêne, l’acacia ou l’orme, et quelques bois tendres comme le sureau.
La pièce de bois m’inspire. Je n’ai donc pas de dessin préparatoire, de planification avant de commencer à travailler. C’est un rapport direct à la matière. Je travaille au rabot et à la gouge. Quand on travaille le bois à la lame, la surface est beaucoup plus propre et durable, donc j’essaie au maximum de travailler sans poncer les pièces.


Pourquoi faites-vous des objets pour le thé ?

La façon de préparer le thé chinois, le Gong Fu Cha, m’inspire depuis longtemps. J’ai appris le Gong Fu Cha en autodidacte, par plaisir. L’aspect esthétique de cette forme de méditation m’a attiré et j’ai voulu faire mes propres pièces. J’ai besoin d’être entouré de belles choses, de voir du beau. Je fais mes pièces pour qu’elles soient cohérentes avec l’esthétique et les objets que j’aime.


Qu’est-ce que c’est le Gong Fu Cha pour vous ?

Pour moi, c’est la meilleure façon de profiter vraiment d’un thé. Je ne suis pas un puriste sur la manière de pratiquer le Gong Fu Cha, pour moi il s’agit juste de faire les meilleures tasses possibles. Cela a un côté méditatif. Ça n’est pas un rituel mais il faut être concentré sur l’instant présent et l’infusion qu’on est en train de préparer. 


Comment votre style a évolué avec le temps ?

Clairement, il y a eu une certaine évolution. Je fais des pièces de plus en plus plates et de plus en plus fines. Je crois que je cherche une certaine fragilité, ce que je retrouve dans mes photos et mes dessins. C’est un parti pris pour moi. Il est important que les pièces soient fragiles ou qu’elles semblent l’être.


Qu’est-ce que vous appelez fragilité ?

Par rapport à mon travail, cela a trait à ce qui est fin, ce qui est sensible. Je joue avec les limites, je cherche une sorte d’équilibre entre le trop cossu, le trop « solide », qui aurait un côté pataud et kitch, et le côté fragile qui pourrait devenir inutilisable. Dans tout mon travail, je cherche à représenter une forme de vulnérabilité qui a sa propre force. Fragile n’est pas faible.


Comment peut-on utiliser vos œuvres ? Il y a des conditions d’utilisation ? Sont-elles mêmes utilitaires ?

Pour moi ce sont vraiment des pièces pour le thé. J’appelle cela des « présentoirs à thé », Cha he en chinois. On y dépose les feuilles de thé sèches. Cela permet de doser le thé, de le regarder et de le sentir.

Les présentoirs n’étant pas poncés, il faut juste les essuyer après le contact avec l’eau et les frotter avec un tissu si nécessaire. Ils sont traités à l’huile de camélia. Ce sont des pièces qui ne demandent pas trop d’entretien et peuvent vivre très longtemps tant qu’on y fait un peu attention.